LA CULTURE DU PARDON
Peut-être ne le réaliserons-nous pas,
mais la culture judéo-chrétienne ambiante fait porter le tort aux
victimes. C'est une culture de violence.
Si cette victime veut faire quelque
reproche que ce soit à son offenseur, on lui demande de ne pas
égratigner encore moins léser l'ego de son offenseur, ni en public
ni en privé. Si la victime s'insurge à l'encontre de cette demande
implicite, on lui fera comprendre qu'elle est en colère - ce qui
n'est pas beau du tout, c'est un vilain défaut - et qu'elle
entretient en elle quelque chose qui la détruit alors qu'elle
pourrait vivre heureuse comme tout le monde, qu'elle est malade et
peut-être anormale. Elle doit trouver des mots qui, comme dans le
« politiquement correct et le marketing d'image » n'offense en rien
son offenseur, tout en parlant de l'offense sans trop avoir l'air de
se plaindre, car le comportement de victime, on n'en veut pas. Bonne
chance car peut-on se sortir indemne d'un tel corset!
Constatons également qu'il est
extrêmement rare de voir ou d'entendre un offenseur demander pardon.
Le mieux en cette matière est une action autonome de s'excuser.
Jamais entend-on un offenseur qui demande pardon, rarement
demande-t-il d'être excuser. Il s'excuse luii-même sans que la
victime ait quelque chose à voir la dedans. Affaire conclue.
Évidemment si l'offenseur est reconnu
comme un criminel et a perdu toute prérogative à un statut social
quelconque , alors là, il est de bon ton qu'il s'humilie au point de
demander pardon. Mais c'est une action réservée à cette catégorie
d'agresseurs. Un offenseur ordinaire dans la vie sociale, ne demande
pas pardon et c'est bien son droit de préserver son statut et sa
dignité dans notre culture violente.
Cela est si vrai qu'un éminent
anthropologue de l'Université de Laval, Bernard Dagenais a écrit un
livre qui montre clairement que l'agresseur a raison, obtient raison,
gagne dans la très vaste majorité des cas des avantages et la
reconnaissance sociale de sa primauté..( DAGENAIS, Bernard L’éloge
de la violence, France, 2008, Éditions de l’Aube, 320 p. )
Sachez que la grande fête de Yom
Kippour chez les juifs permet à chacune et à chacun de faire porter
ses offenses, agressions, fautes et péchés sur un bouc qui sera
envoyé au désert pour y mourrir. Cela évite, assurément de
demander pardon à la victime de ses actes et permet , sans regret,
de recommencer à neuf annuellement. Et sous des dehors conquérante,
la culture juive construit la culture de victime en son sein. Sans
oblitérer les avatars subis par ce groupe d'humains, disons que le
juif errant y trouve son compte.
Ajoutons le Notre Père qui nous
viendrait de Jésus lui-même. On y demande à la victime de
pardonner à son offenseur s'il veut être pardonné, wow! par Dieu
lui-même, de ses propres fautes., Pas un mot d'injonction à
l'agresseur qui s'en tire totalement indemne. Cela aura contribué,
nommément, au pouvoir ecclésiastique de régner sur un troupeau
d'asservis.
Le XXe siècle a commencé à
réinventer le pardon sur une large échelle. Desmond Tutu, Nelson
Mendala en Afrique du sud y sont allés d'une contribution majeure.
Ici, suite à l'abolition du crime de l'apartheid on a cherché tout
d'abord à établir clairement et explicitement les faits et gestes
des agresseurs, les agresseurs ont demandé pardon, et on a suggéré
aux victimes d'offrir le pardon. D'autres peuples ont suivi cet
exemple réparateur. Le pape lui-même verse un peu dans la
reconnaissance des fautes de l'église catholique à l'égard des
juifs, un peu moins à l'égard des femmes et des enfants agressés.
VOIC LES ÉTAPES QUE NOUS VALORISONS
AFIN DE RECONSTRUIRE LES LIENS DE CONFIANCE MIS EN CAUSE PAR DIVERSES
OFFENSES ET AGRESSIONS.
POUR L'AGRESSEUR, VOICI DES ÉTAPES
UTILES OU NÉCESSAIRES:
N .B .( Une bonne façon, généralement
valable, de savoir si une action de notre part a été offensante est
de s'en remettre à la perception de la personne qui se sent
offensée.)
1. Reconnaître les offenses comme
lui appartenant; assumer son entière responsabilité pour les gestes
d'offense commis.
2. Nommer spécifiquement les
faits offensants .
3. Reconnaître l'effet néfaste
objectif des offenses commises et reconnaître qu'ils ont pu avoir et
ont eu cet effet sur la victime.
4. Éprouver des regrets sincères,
les communiquer spécifiquement à la victime.
5. Manifester une empathie
véritable devant les blessures causées et demander pardon sans
toutefois attendre de le recevoir ( le donner appartient à une
victime libre de le donner.)
6. Réparer les torts causés à la
victime. Ce peut-être nommément par une reconnaissance publique de
l'offense et du tort occasionné si celle-ci est publique ou d'autre
forme de compensation et de réparation en lien avec l'offense.
RECONNAÎTRE CES ÉTAPES ET LES METTRE
EN ŒUVRE, C'EST CONTRIBUER À UNE CULTURE DE DIGNITÉ POUR TOUS.
AINSI S'AMENUISERA LA CULTURE DE VIOLENCE DANS LAQUELLE NOUS BAIGNONS
SI ABONDAMMENT.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire