mardi 24 avril 2012

LA CULTURE DU PARDON


LA CULTURE DU PARDON


Peut-être ne le réaliserons-nous pas, mais la culture judéo-chrétienne ambiante fait porter le tort aux victimes. C'est une culture de violence.


Si cette victime veut faire quelque reproche que ce soit à son offenseur, on lui demande de ne pas égratigner encore moins léser l'ego de son offenseur, ni en public ni en privé. Si la victime s'insurge à l'encontre de cette demande implicite, on lui fera comprendre qu'elle est en colère - ce qui n'est pas beau du tout, c'est un vilain défaut - et qu'elle entretient en elle quelque chose qui la détruit alors qu'elle pourrait vivre heureuse comme tout le monde, qu'elle est malade et peut-être anormale. Elle doit trouver des mots qui, comme dans le « politiquement correct et le marketing d'image » n'offense en rien son offenseur, tout en parlant de l'offense sans trop avoir l'air de se plaindre, car le comportement de victime, on n'en veut pas. Bonne chance car peut-on se sortir indemne d'un tel corset!


Constatons également qu'il est extrêmement rare de voir ou d'entendre un offenseur demander pardon. Le mieux en cette matière est une action autonome de s'excuser. Jamais entend-on un offenseur qui demande pardon, rarement demande-t-il d'être excuser. Il s'excuse luii-même sans que la victime ait quelque chose à voir la dedans. Affaire conclue.


Évidemment si l'offenseur est reconnu comme un criminel et a perdu toute prérogative à un statut social quelconque , alors là, il est de bon ton qu'il s'humilie au point de demander pardon. Mais c'est une action réservée à cette catégorie d'agresseurs. Un offenseur ordinaire dans la vie sociale, ne demande pas pardon et c'est bien son droit de préserver son statut et sa dignité dans notre culture violente.


Cela est si vrai qu'un éminent anthropologue de l'Université de Laval, Bernard Dagenais a écrit un livre qui montre clairement que l'agresseur a raison, obtient raison, gagne dans la très vaste majorité des cas des avantages et la reconnaissance sociale de sa primauté..( DAGENAIS, Bernard L’éloge de la violence, France, 2008, Éditions de l’Aube, 320 p. )


Sachez que la grande fête de Yom Kippour chez les juifs permet à chacune et à chacun de faire porter ses offenses, agressions, fautes et péchés sur un bouc qui sera envoyé au désert pour y mourrir. Cela évite, assurément de demander pardon à la victime de ses actes et permet , sans regret, de recommencer à neuf annuellement. Et sous des dehors conquérante, la culture juive construit la culture de victime en son sein. Sans oblitérer les avatars subis par ce groupe d'humains, disons que le juif errant y trouve son compte.


Ajoutons le Notre Père qui nous viendrait de Jésus lui-même. On y demande à la victime de pardonner à son offenseur s'il veut être pardonné, wow! par Dieu lui-même, de ses propres fautes., Pas un mot d'injonction à l'agresseur qui s'en tire totalement indemne. Cela aura contribué, nommément, au pouvoir ecclésiastique de régner sur un troupeau d'asservis.


Le XXe siècle a commencé à réinventer le pardon sur une large échelle. Desmond Tutu, Nelson Mendala en Afrique du sud y sont allés d'une contribution majeure. Ici, suite à l'abolition du crime de l'apartheid on a cherché tout d'abord à établir clairement et explicitement les faits et gestes des agresseurs, les agresseurs ont demandé pardon, et on a suggéré aux victimes d'offrir le pardon. D'autres peuples ont suivi cet exemple réparateur. Le pape lui-même verse un peu dans la reconnaissance des fautes de l'église catholique à l'égard des juifs, un peu moins à l'égard des femmes et des enfants agressés.


VOIC LES ÉTAPES QUE NOUS VALORISONS AFIN DE RECONSTRUIRE LES LIENS DE CONFIANCE MIS EN CAUSE PAR DIVERSES OFFENSES ET AGRESSIONS.


POUR L'AGRESSEUR, VOICI DES ÉTAPES UTILES OU NÉCESSAIRES:


N .B .( Une bonne façon, généralement valable, de savoir si une action de notre part a été offensante est de s'en remettre à la perception de la personne qui se sent offensée.)

1. Reconnaître les offenses comme lui appartenant; assumer son entière responsabilité pour les gestes d'offense commis.

2. Nommer spécifiquement les faits offensants .

3. Reconnaître l'effet néfaste objectif des offenses commises et reconnaître qu'ils ont pu avoir et ont eu cet effet sur la victime.

4. Éprouver des regrets sincères, les communiquer spécifiquement à la victime.

5. Manifester une empathie véritable devant les blessures causées et demander pardon sans toutefois attendre de le recevoir ( le donner appartient à une victime libre de le donner.)

6. Réparer les torts causés à la victime. Ce peut-être nommément par une reconnaissance publique de l'offense et du tort occasionné si celle-ci est publique ou d'autre forme de compensation et de réparation en lien avec l'offense.



RECONNAÎTRE CES ÉTAPES ET LES METTRE EN ŒUVRE, C'EST CONTRIBUER À UNE CULTURE DE DIGNITÉ POUR TOUS. AINSI S'AMENUISERA LA CULTURE DE VIOLENCE DANS LAQUELLE NOUS BAIGNONS SI ABONDAMMENT.